Ne vous fiez pas à mon aspect juvénile, mes racines sont partout et plus anciennes que vous, que votre ordre, que votre dieu.
J'étais une forêt, j'avais un nom si long qu'une vie d'homme ne suffirait pas pour l'égrener. J'étais une forêt et il est arrivé.
Noble il était, imbu de son rang et pourtant, il recherchait calme et méditation. Erreur ou faute, je lui permis de s'établir dans la recherche érémitique de sa vérité. Trois anachorètes étaient peu face à mes entrelacs sylvestres.
Las, la vertu a ceci de destructeur qu'elle attire les âmes perdues et l’ermitage devint cloître, dévorant ma chair ligneuse, brûlant mes membres pour la plus grande gloire de celui qui fut pourtant nu sur le bois d'olivier.
De mes entrailles l'on sortit une armure de pierre qui perdit souffle sous les coups des hommes du Nord mais la paix, compagne trompeuse, fit se lever murailles et colonnes dont la vanité poussait l'essor à la hauteur de l'orgueil des bâtisseurs.
Je n'étais plus que racines, survivant dans le tartare souterrain que ne pouvaient atteindre les homuncules dont les batailles ne me parvenaient que par bribes assourdies.
Le temps passe et les siècles ne sont qu'un sourire fugace dans l'océan des larmes éternelles. Le regard détourné des maîtres fit plus que l'outrage des temps et la rapacité parfit l'ouvrage.
Fières icônes d'une trompeuse splendeur, les trônes de pierre furent renversés et les fourmis rompirent le fil de leur fol orgueil. Le faîte n'était plus, la pluie était fête.
Siècles et ères, que m'importe le babillage des myrmidons, seul est vrai le chant de l'onde, constante est ma présence. Je reviens parmi les marais, je reviens du fond des sources, je reviens et mon nom sera celé dans les murmures des ruisseaux.
Photos prises à l'abbaye de St Evroult Notre Dame du Bois
Texte inspiré par l'histoire de l'abbaye
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