Pas facile de taper sur le clavier aujourd'hui...
Tiens, je vais mettre mes Converse rose bonbon, ça va aller avec ma chemise et ça plaît aux gamins de ma classe, surtout aux petites filles.
Huit heures sept, je sors de la maison. Boudiou, il tombe des cordes ! J'ajuste mes écouteurs, ce matin, c'est Paul McCartney qui va m'accompagner au boulot : seize à dix-sept minutes de marche à pied pour aller à l'école.
Depuis cette année, j'ai laissé tomber le vélo. Trop dangereux. En quinze ans sur ce trajet, je me suis fait plier deux roues et j'ai pris une portière dans la figure.
Il choit une bonne renapée et je rabats ma capuche sur mes écouteurs pour éviter de ressembler à une serpillière en arrivant à l'école. Malgré le temps humide, j'apprécie l'atmosphère de cette fin de nuit car il fait très doux, ce qui repose un peu d'un mois continu de températures glaciales.
Je m'engage sur le passage piéton situé à quinze mètres de mon domicile...
Boum ! Tiens, une voiture qui me fait une béquille en haut de la cuisse !
Tiens, je bascule violemment sur un capot ! Ah, il freine enfin le gars, ce qui a pour effet de m'éjecter sur le sol.
Juste un saut de deux bons mètres en grande partie accompagné par l'automobile. Je suis sur le ventre et je regarde devant moi : pourvu qu'un débile n'arrive pas dans l'autre sens. Non... Tiens, si je lève la tête pour observer cela, c'est que la colonne vertébrale n'a pas trop morflé. Il faut dire que mon gros cartable plein de cahiers a pris une bonne partie du choc quand j'ai élégamment percuté le capot de trois-quarts dos.
Je me retourne pendant que des gens se regroupent autour de moi. Sur le coup, j'ai bien envie de me lever mais une douleur à l'épaule me rend prudent. Et puis, j'ai plus d'adrénaline que de sang dans les veines en ce moment et je suis partiellement en état de choc.
Le conducteur de la bagnole doit avoir une bonne soixantaine ou alors, il ne fait pas assez de sport. Il se penche vers moi et je constate qu'il est plus paniqué que moi. Je le rassure.
Tiens, les pompiers sont déjà là ! Chouette, je vais avoir droit à la voiture rouge ! Les deux jeunes gars tiennent absolument à me sécuriser la colonne et m'enfournent dans leur véhicule comme Josette l'a fait récemment pour le chapon de Noël : ficelé et bien farci.
Tiens, Josette est là aussi. Je plaisante constamment avec les pompiers et ils demandent à mon épouse si je suis tout le temps comme ça. Elle répond par l'affirmative d'un air désolé...
En fait, je ne suis pas tout à fait dans mon état normal, le choc nerveux a activé la machine à déconner et je suis excité comme une puce. C'est un réflexe de survie. Tant que je dis des âneries, c'est que je suis toujours vivant.
Avant le départ pour les urgences, je demande à Josette de m'amener un appareil photo à l'hôpital. Je pense déjà à mon blog. Ça va mieux.
Les urgences de l'hôpital d'Alençon, je les connais mais aujourd'hui, j'en découvre les plafonds, sanglé que je suis sur mon brancard. Intéressant.
Mars Attacks !
Les urgences, c'est un monde à part. Il y a des gens partout, des lits dans les couloirs, des poivrots qui gueulent, des vieux qui geignent, du stress et un boulot dingue mais médecins et infirmières te traitent toujours avec le sourire, t'écoutent et prennent même le temps de discuter avec toi si c'est nécessaire.
Je suis trempé et je laisse une très jolie et très jeune infirmière brune aux yeux bleus me dévêtir partiellement. J'apprécie tout en regrettant l'époque où le personnel soignant féminin ne portait que des blouses. Saletés de tuniques, ça gâche le plaisir !
La gamine me prend mes constantes : cœur à 49. Je l'avertis que je ne suis pas en train de calancher, je fais seulement de la course à pied.
Un petit tour par la radio. L'opératrice est cool, comme tout le monde dans cet apparent capharnaüm.
De retour dans le service, une femme médecin lit mes radios, je l'informe que cette épaule a déjà subi deux luxations partielles. Ça se voit, me dit-elle. Apparemment, il n'y a pas de bobo important.
"Vous avez eu de la chance..."
On cause un moment de pédagogie de la lecture pendant qu'elle me fait mon arrêt de travail. Je vais avoir du mal à écrire au tableau pendant quelques jours. Zut ! Et mon clavier d'ordinateur, je ne vais quand même pas m'en priver ! Va falloir s'adapter.
Josette revient me chercher. Accident, pompiers, urgences, radio, consultation : deux heures trente chrono. Je suis sûr qu'en cas de compétition, je ne serais pas loin du podium.
On est bien mais rien ne vaut la maison d'autant que les nerfs tombent et je ressens comme un coup de pompe. Je vais peut-être remettre ma séance de fractionnés de ce soir à samedi.
Je remercie tout le monde et je repars avec mon ordonnance à la main.
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Une voiture un peu plus haute, un peu plus rapide, un conducteur un peu plus miraud et crouîîîk, plus de Lutin ! Ça correspond tout à fait à ma vision de l'existence. Un jour, tu es là, l'instant d'après, tu n'es plus là... C'est tout le tragique et toute la beauté de la vie. C'est aussi pour cela qu'elle vaut la peine d'être vécue.
N'empêche, la prochaine fois, je regarderai plus attentivement quand je traverserai...
Bonsoir,
RépondreSupprimerLou-Ann m'a annoncé qu'elle était sans maître à l'école, et que tu avais effectué un double salto avec vrille, par contre la réception n'a pas pu être homologuée par les juges.
Bonne récupération & à bientôt.
P.S.1 : Auras-tu le temps de transmettre la liste des mots pour l'auto-dictée, histoire que je lui pourrisse un peu son dimanche après-midi? gniark gniark !
P.S.2 : bien vu l'effet d'optique "corbillard" du passage clouté !