mercredi 27 novembre 2013

Marathon de la Rochelle 2013


Le marathon, c'est un peu comme la vie en miniature avec ses joies et ses drames, ses réussites et ses échecs. On en prend plein la figure mais chaque pépite de jouissance, si brève soit-elle, donne un sens à notre folle course vers le néant, rendant le but dérisoire et le mouvement sublime. 

Ce concentré d'existence, cette galopade céleste, a quelque chose de magique que je ne retrouve dans aucune autre épreuve et c'est pourquoi malgré tous les crashes et autres avanies, pour la vingtième fois sur le métier je remets mon ouvrage.


Hébergés comme à l'accoutumée par ma chère Mimi, Josette et moi avons cette fois-ci amené dans nos bagages la cousine Françoise, primo-marathonienne et bobologue de profession. Voici trois mois que nous nous entraînons en compagnie de la blonde Katia qui en est à son quatrième marathon et qui est déjà complètement accro.

Choyés par notre hôte et ma Josette, nous nous apprêtons à partir vers notre aventure de 42 km. J'ai l'air détendu mais je n'en mène pas large. Tout a été prévu sauf l'imprévisible : le cœur et les jambes de Françoise sont à toute épreuve et je suis là pour la coacher. Cependant, cela fait une semaine que je somatise stupidement. On ne se refait pas ...



Huit heures, l'air est glacial et le ciel gris. Alea jacta est ; à défaut de franchir le Rubicon, nous parcourons le kilomètre nous séparant du départ en petite foulée polaire : un peu pingouins dans nos sacs poubelle, un peu tremblants tels des enfants saisis par les premiers frimas.



Arrivés Espace Encan, lieu du départ, nous retrouvons Katia et François. Ce dernier, non content de m'avoir malproprement mais régulièrement poutré au marathon de Vannes un mois auparavant, a décidé de me faire une surprise pour mon vingtième marathon : il s'est déguisé en Claude François, sachant à quel point j'abhorre la variété française de mon adolescence. J'en oublie mes appréhensions et le ciel se découvre subitement, habillant de bleu l'éclat de rire doré de notre déconnant compagnon.


J'ai enfin le plaisir de connaître Roland, l'ex-prof de François, fier de nous annoncer qu'à 80 ans et neuf mois, il court son 76ème marathon qu'il finira en 4h42', chapeau Roland !


Et c'est parti !!!

Photo organisation

Petit résumé en images du départ :

 

Avec l'entraînement subi pendant trois mois, les filles n'ont pas de mal à trouver le rythme mais courent cependant un peu vite sans toutefois dépasser les bornes. Le Mail est vite grimpé et après un clin d'oeil à l'océan, nous replongeons en ville. Nous faisons brièvement la connaissance de Deudeu87, bon compagnon kikou qui devra s'arrêter au 32ème kilomètre. Dix bornes sans dépasser les bornes et quelques délires :

 

Sur des bases de 5'35" au kilomètre, nous cheminons joyeusement pour atteindre le semi. Le ciel est bleu et les filles sont belles, belles, belles comme le jour ... Zut ! Moi aussi je suis pris par le syndrome Claude François !

 

Cela fait un bon moment que les filles que j'entraîne m'ont demandé ce qui pouvait bien me motiver à leur consacrer tant de temps et d'énergie. Je leur ai toujours répondu que le plaisir était pour moi et que j'étais grassement payé en retour, vu que j'avais quatre fois par semaine la joie d'avoir leur joli postérieur s'agiter sous mes yeux jamais blasés par un aussi charmant spectacle. Le fait d'être un mari honnête n'a jamais émoussé mon sens de l'observation ... 

Voilà trente kilomètres que je suis sur un nuage grâce aux filles et au ludion François qui pétille au soleil. Nous en sommes à l'épreuve de vérité. Il est temps de confier Katia à François pour qu'elle parte sur les bases de son record de 3h56' pendant que je me concentre sur la cousine Françoise.

 

Jean-Baptiste, avec qui nous avons mangé hier soir, nous accompagne depuis un moment. Il a pris le "mur" en pleine figure et je fais ce que je peux pour l'encourager à garder le rythme mais il faut que je me concentre sur la cousine dont la machine se dérègle. Des douleurs non prévues à l'entraînement viennent progressivement enrayer la bonne marche de cette mécanique suisse. Le rythme reste de 5'33" au kilo jusqu'au 35ème puis Françoise desserre enfin les dents : "J'ai mal".

Cet aveu de quelqu'un d'aussi fort et volontaire en dit long sur sa souffrance. Une tragédie en miniature se déroule sur le bitume et j'essaie de jouer mon rôle, alternant les encouragements, la fermeté et même quelques bouffonneries pour détendre l'atmosphère. Comme Françoise n'est pas la seule à souffrir, alors que nous cheminons à moins de 9 à l'heure sur le port des Minimes, je lui propose d'attraper un de ces superbes jeunes hommes qui se traînent devant elle pour qu'elle en fasse son ordinaire. 

Ma cousine arrive quand même à sourire de mes pitreries mais je sens bien que la douleur est en train de la scotcher au macadam. Il faut que je la coache plus fermement. C'est dur pour elle qui doit subir mes encouragements répétés et ce n'est pas facile pour moi qui n'ai aucun goût pour la torture. 

Notre objectif initial est de 3h59' ; je vois dangereusement fondre notre avance. Je dois prendre une décision et elle est vite prise : nous n'avons pas fait tout ce travail d'entraînement pour rien. Tant pis si Françoise m'insulte à l'arrivée, on va se sortir les tripes, et pas qu'à la mode de Caen !

 

3h59'52", j'ai poussé la cousine dans ses derniers retranchements mais je n'en suis pas fier. Je n'aime pas cela. Cependant, je suis heureux pour Françoise qui a gravi avec courage et ténacité son premier marathon. Vite, je lui tends des vêtements et l'aide à enfiler son coupe-vent chèrement gagné.


Je la prends dans mes bras, je l'embrasse et lui dis à quel point je suis fier d'elle mais j'ignore si elle m'entend... 

Quelques minutes plus tôt :


Le François, bon camarade, a rempli son office et mené Katia sur l'égalisation de son record : 3h56'58". Negative split !


Trois jours plus tard, un message de Françoise arrive sur mon ordinateur : "Voilà que j'ai déjà l'envie de recommencer !!!! la souffrance est déjà oubliée !"

C'est ça le marathon ...



Photos additionnelles de ma Mimi et de ma Josette.


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