On a parfois besoin de plus petits grands que soi
Parmi les nombreuses espèces d'acacias, on ne peut pas dire que l'acacia siffleur soit le plus beau ou le plus majestueux. Si l'on y regarde de plus près, on s'aperçoit que cet acacia abrite une petite fourmi qui vit en colonie sur ses branches.
En fait, quatre espèces différentes de crematogaster et de tetraponera se disputent ces arbustes car ceux-ci possèdent à la base des épines des renflements appelés domitia (de domus, maison) qui servent d'abri aux petites fourmis :
Mais, ce n'est pas tout ! L'acacia siffleur possède des sortes de glandes qui exsudent un liquide sucré, une sorte de nectar extra floral dont raffolent les fourmis.
Tetraponera, sa piqûre est aussi douloureuse que celle d'une guêpe
Vous comprendrez que nos insectes défendent férocement ce pays de Canaan qu'est l'acacia drepanolobium. Tout d'abord en exterminant les autres colonies de fourmis présentes, ensuite en limitant la prolifération d'autres insectes parasites de l'arbre mais surtout en s'attaquant férocement aux grands herbivores amateurs de feuilles d'acacia comme les éléphants, les antilopes ou les girafes.
Tout allait bien dans le meilleur des mondes jusqu’à ce que des scientifiques américains décident de voir ce que cela ferait si l'on protégeait les acacias des herbivores en entourant certains spécimens de clôtures en gardant à côté des arbres témoins pour avoir des éléments de comparaison.
L'expérience menée de 1995 à 2007 a révélé un surprenant phénomène : les fourmis quittaient les arbres protégés par des clôtures et ceux-ci dépérissaient sous les attaques d'insectes xylophages devenus plus nombreux du fait de la désertion des fourmis. De fait, ils perdaient leurs feuilles alors qu'aucun herbivore ne venait les manger !
Les arbres témoins, régulièrement broutés par les éléphants et autres girafes (à leurs risques et périls) continuaient de prospérer.
En y regardant de plus près, l'on s'est aperçu qu'après quelques années sans se faire régulièrement brouter, les acacias clôturés n'avaient plus éprouvé le besoin de nourrir leurs hôtes et s'étaient mis à produire de moins en moins de nectar, le rôle des fourmis ne semblant plus aussi important.
Mauvais calcul de la part de notre végétal : vexées, les fourmis se sont fait la malle pour aller trouver d'autres arbustes plus accueillants, laissant le champ libre à tout un tas de petits insectes parasites qui, lentement mais sûrement, se mirent à boulotter les imprévoyants et ingrats acacias.
Cette expérience a permis de mettre en évidence le fait que, loin de nuire aux acacias, les herbivores, en broutant les arbustes, déclenchaient une réaction symbiotique entre le végétal et les fourmis qui permettait au premier de se protéger d'ennemis plus discrets mais à l'action plus définitive. Les grands herbivores disparus, l'acacia, déserté par ses hôtes dépérissait puis mourait à petit feu.
Source :
Breakdown of an Ant-Plant Mutualism Follows the Loss of Large Herbivores from an African Savanna ToddMaureen L. Stanton, Truman P. Young, Jacob R. Goheen, Robert M. Pringle, and Richard Karban.
Science 11 January 2008 : Vol. 319. no. 5860, pp. 192 - 195
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