mercredi 15 septembre 2010

6 heures de Briouze 2007


Le Lutin se crashe à Briouze

Je ne sais pas si c’est la bière ou l’adrénaline mais quand je retourne chez moi ce vendredi soir après avoir couru les Foulées de Montsort, je n’ai pas envie de dormir et, après la douche, je me mets devant la télé puis devant mon PC pour enfin me coucher à minuit.

Bizarre, après seulement quatre heures de sommeil, je me réveille en forme et quelques heures après, je pars au boulot, retrouver mes vingt-quatre gamins.

Onze heures trente : je gicle jusqu’à la maison où je prépare mon sac. Midi un quart, Vincent vient me chercher.
Vincent, c’est un jeune (il a 43 ans), il est dentiste (ça fait peur, hein ?) et il a un potentiel énorme qu’il n’exploite que partiellement. Il est revenu du Marathon des Sables en étant presque déçu de n’avoir pas plus souffert. Maintenant, il prépare la Diagonale des Fous et va à Briouze pour son entraînement.
Quelques heures auparavant, j’ai raconté à sa sœur  qui travaille dans mon établissement que moi et Vincent, nous nous rendions à la Gay Pride. Humour de Lutin !

Une heure de route après, nous arrivons à Briouze, gros bourg du bocage ornais. Nous allons chercher nos dossards et là, nous voyons deux choses : Briouze, ce n'est pas une organisation de rigolos et ce n’est pas non plus une course de culs de jatte. Des pointures sont là dont un champion de France de 100km. Houlà, faisons-nous discrets.
C’est à ce moment que le clampin au micro me repère, me nomme tout fort et annonce que, malgré les Foulées de Montsort courues hier (zut, il était là !), je vais faire les 6h en individuel. Il me tend le micro dans lequel je bafouille, je borborygme en expliquant que je ne suis là que pour finir.

Le départ. Je cause avec Jacques Nevoux, le gourou du démoniaque Trail d’Athis qui me demande si je fais l’UTMB comme mes copains. Je dénie, je négative, je démens. Je ne suis qu’un Lutin, pas un surhomme !
J’aperçois Francine, la championne locale avec qui j’ai couru les 10 km d’Argentan. Je l’ai déjà passée sur Alençon-Médavy, je vais donc la suivre. Elle est une assurance de bonne perf.

Et c’est le départ ! Les relayeurs démarrent à fond. Ils peuvent courir par 3 ou 6. Sur un circuit de 3,5 km, ils peuvent galoper comme des malades. Je pars à 10 à l’heure, mon objectif étant de 60 km. Vincent est un peu étonné de me voir aussi prudent. Le Lutin aurait-il donc enfin un peu de cervelle ?
Le circuit est très agréable : un bout de ville, un sous-bois, un champ, une route départementale qui schlingue grâce à la présence d’une station d’épuration, un chemin herbeux le long d’une voie ferrée puis le bourg à nouveau. On ne s’ennuie pas. Le circuit est parfait comme l’organisation.

Vincent et moi, nous courons avec un gars de Vimoutiers fort avenant et assez impressionnant : pas loin d’un mètre quatre-vingt-dix pour cent kilos. On cause, on cause et une heure passe puis une autre sans trop de peine à raison de trois tours à l'heure.
Soudain, le colosse démarre et Vincent le suit. Je sens que je ne suis plus aussi frais. Je garde mon rythme.
Le Balèze, paiera rapidement ce démarrage et finira par abandonner. Quant à moi, je n’ai droit qu’à un abandon par an et j’ai déjà épuisé mon crédit au trail d’Ecouves.

Trois heures, je ne me sens plus aussi bien, la fatigue s’installe. J’entends le speaker annoncer le passage de Francine, première féminine trois minutes avant moi. Allez, courage Lutin, rattrape la championne.
Et là, c’est le drame : au onzième tour, je suis atteint par le syndrome du pruneau d’Agen.
Non ! Pas ça ! Pas comme à Athis ! Me voilà trahi par l’ennemi de l’intérieur.
Je passe tout le tour à lutter contre la Nature mais en vain. Au ravito, je subtilise de l’essuie-tout et je repars le côlon tressautant. Mon œil exercé de traileur me permet de trouver la haie salvatrice où je peux calmer les ardeurs intestinales de mon corps en révolte.
Je sors de la haie en sifflotant d’un air dégagé. Je n’ose pas me laver les mains dans le bac à épongeage qui se trouve à peu de distance. Il faut s’appeler Mustang pour être aussi mal élevé !

Douzième tour, je suis à nouveau mal mais j’ai pensé à l’essuie-tout. Je retourne le long de ma haie préférée. Bis repetita, cette fois-ci, je suis vidé et je me sens faible mais moins dolent.
En fait, je me déshydrate et je m’aperçois vite que je ne peux plus rien avaler à part de l’eau plate en petite quantité. Je ne vais pas bien. Francine me passe pour la première fois, je la félicite.

Treizième tour : le potage. Je marche, je cours, je ne suis plus très lucide, Vincent me passe et s’enquiert de mon état de santé. Pas terrible, le Lutin mais il finira.
Je revois ma fidèle haie et, là, horreur ! Un réflexe pavlovien me fait contracter l’abdomen : mes intestins ont reconnu l’endroit, mon corps ne m’obéit plus et je me retrouve à nouveau au même endroit à évacuer je ne sais quoi. A travers le brouillard de mon esprit, j’ai l’impression d’entendre les mouches applaudir à tant de constance et de régularité intestinale. J’ai dépassé le stade de la honte et j’arrache diverses herbes pour une utilisation peu glorieuse bien qu’écologique.

Après Athis et ma quasi dernière place, Ecouves et mon abandon, voici Briouze qui tourne mal. Mon amour propre n’a plus de propre que le nom. Cette année 2007, c’est vraiment l’Annus Horribilis !

Je ressors de ma haie et je trottine péniblement. Francine me double pour la deuxième fois quelle championne !
Une dame à la carrure de déménageur voit que je ne suis plus très frais. Elle me conseille gentiment de faire un tour en marchant pour récupérer. Je n’ai pas le choix.

Excellent conseil, après un quatorzième tour en musardant, je redémarre bien plus lucide. Je sais que je n’aurai aucun mal à atteindre les quinze tours. Francine me passe une troisième fois et je la félicite sans arrière-pensée, le sport est une grande école d’humilité.

Je vais plus vite et je rattrape la bienfaitrice qui m’a donné un si bon conseil. Elle aussi est calcinée comme pas mal de monde. Beaucoup marchent, les relayeurs nous décoiffent en passant. Quelques-uns nous encouragent gentiment.
C’est la fin, j’ai décidé de rester avec cette dame si sympathique qui se révèle fort bavarde et qui, tout en souffrant me narre ses différents trails : Tchimbé Raid  à la Martinique, la Diagonale des Fous, les Templiers dont je courus la même édition (Ah, la mer de nuages au petit matin …).

 La ligne d’arrivée, mon accompagnatrice me fait une virile poignée de main de basketteur (son sport d’origine) et va retrouver son mari. Je m’assois en attendant Vincent. Je retrouve Runner 14 plus frais que moi malgré les Foulées des Bistrots courues la veille.
Je vois Francine entrer dans l’ambulance, le teint terreux. Elle a payé sa victoire un bon prix mais elle s’en remettra.
Vincent arrive, il a fait 17 tours et atteint son objectif. Il est aussi bien fatigué et nous décidons de rentrer malgré l’excellente ambiance qui règne en cette fin de course.

J’ai eu mal mais je reviendrai. Seul ou en équipe, je ne sais pas encore. Il faut que j’en parle à Mustang.
Euh, demain je crois que je ne vais pas faire le Lutin en forêt d’Ecouves avec mes copains et ma Josette, un peu de repos s’impose.


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