samedi 26 avril 2014

Naguère des écoles, épisode 15


 Informatique


Passionné de science-fiction et de technologie depuis mon enfance dans les années 60, j'étais à l'époque un geek qui s’ignorait. Ce n'est que lors du fameux plan informatique de Monsieur Chévènement dans la première moitié des années 80 que j'eus un premier contact avec l'informatique. A cette époque, Thompson voulait se débarrasser de son stock d'ordinateurs personnels To7 et Mo5 dont l'utilité domestique était aussi douteuse que le prix était élevé. Coup de chance, le précédent ministre de la Recherche et de la Technologie venait d'être nommé ministre de l'Education Nationale. La France scolaire fut ainsi inondée de ces ordinateurs peu pratiques dont les programmes se chargeaient à l'aide de cassettes identiques à celles qui servaient à l'époque à écouter de la musique dans son "Walkman". 

Ayant hérité d'une belle salle informatique dans mon école de campagne, je me mis en tête de faire pratiquer l'informatique à mes élèves de CE2-CM1-CM2. La chose n'était pas aisée, certains programmes mettaient jusqu'à un quart d'heure à charger quand ils ne plantaient pas à cause d'un défaut de lecture de la cassette. A l'époque, pas de souris mais seulement un clavier et le fameux crayon optique qui se déréglait constamment, ce qui le rendait inutilisable. Les élèves étaient cependant passionnés par ce que je leur proposais et chaque matin, j'installais un programme qui chargeait pendant la dictée et dont l'usage était libre durant la journée en fonction de l'avancée du travail de chacun. Le plus grand succès de cette époque fut "Androïd", un jeu de plateforme au clavier qui avait l'avantage de posséder une partie création, permettant aux enfants de créer puis tester de nouveaux décors parfois plus intéressants que les originaux.


Ce n'est que bien des années plus tard que je repris l'enseignement de l'informatique, après une parenthèse de trois ans en zone "sensible" et douze ans en CP. A cette époque, dans ma nouvelle école de centre-ville, nous avions une salle informatique fort peu utilisée et pourvue de PC Windows. J'avais entre-temps appris non seulement à me servir de ce genre d'instrument mais aussi à le démonter, remonter et éventuellement changer des pièces. 

Quand je pris une classe de CE1-CE2, j'étais déjà le plus âgé de l'école mais aussi le plus à l'aise avec l'informatique. C'est pourquoi on me chargea de l'élaboration du site de l'école, ce que je fis avec enthousiasme et en me formant moi-même au langage HTML qui me permit de créer le site à partir de rien. Enfin, rien signifie une centaine d'heures de travail en plus de mon labeur habituel de maître d'école. Je fus bien aidé par le conseiller pédagogique en informatique du département qui fut malheureusement remplacé par la suite. 

Mon site d'école marcha du feu de Dieu et mes élèves apprirent à y insérer des textes, images et même vidéos. A un moment, ma classe pouvait produire deux à trois documents par semaine dans toutes les matières. Le problème c'est que malgré mon aide, les autres classes produisaient peu et cela créait un déséquilibre de communication entre les classes. 

Au bout d'un  an de franc succès, j'eus la visite de la nouvelle conseillère en informatique qui me demanda de fermer ce site "excellent par ailleurs" car il n'était pas hébergé par des instances administratives ad hoc. En gros, ce site d'école était trop libre. Qu'à cela ne tienne, je créais un blog d’école sur un hébergeur de l'Académie et je remis les enfants au travail. Gros succès, les parents étaient ravis de toutes ces communications sur le sport, les sciences, l'art, la poésie, etc... Problème, emporté par mon enthousiasme, je n'avais pas calculé que je produisais dix à vingt fois plus que les autres écoles de la circonscription. C'était mal vu... Par certains enseignants et aussi par la conseillère qui n'avait pas apprécié que je lui fasse maladroitement sentir que j'étais assez geek pour être plus compétent qu'elle en informatique.

En fait, à part de rares exceptions, les blogs d'écoles ne marchaient pas et présentaient de pauvres visages désertiques... L'Académie décida de les fermer sous prétexte qu'ils n'étaient pas sécurisés et que n'importe qui pouvait y accéder et ainsi voir le travail fourni par les élèves.

L'étape suivante fut les sites verrouillés d'écoles sous contrôle de l'Inspection auxquels ne pouvaient accéder que les parents munis chacun d'un code adéquat. Pour un blogueur adepte du partage et de l'ouverture au monde tel que moi, le projet devenait insipide et inintéressant. J'avais encore changé de niveau et j'enseignais à présent à des CM2 qui possédaient de toute façon un PC à la maison. Après toutes ces années, l'informatique était plus devenue un outil qu'une matière à enseigner et j'avais moins à apporter à mes élèves à ce niveau. Et puis, j'avais tant à faire au niveau grammaire et orthographe...




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